Attention, cet article comporte des spoilers sur la série animée Psycho Pass. Je vous en déconseille donc la lecture si vous ne l'avez pas encore vue et que vous souhaitez vous y mettre. Après, si tel n'est pas le cas, libre à vous de faire ce qui vous chante.
Avant d'aborder le cas de Makishima Shougo, tueur psychopathe épris de philosophie, il me semble à propos de revenir rapidement sur l'oeuvre Psycho Pass et la place importante que ce personnage y occupe, dans la première saison tout du moins.
Psycho Pass est donc une série réalisée par le studio d'animation Production I.G. et écrite par Gen Urobuchi. L'histoire prend place dans un Japon futuriste, un monde dystopique au sein duquel le crime et le fonctionnement de la société sont régulés par une intelligence artificielle nommée Sybille, ce notamment grâce à la mise au point de "scans cymatiques" permettant de lire l’âme des gens (soumise donc au jugement de Sybille), soit de détecter leurs éventuelles mauvaises intentions et leurs futures actions néfastes, quand bien même lesdites actions n’ont pas encore été commises, dans une perspective comparable au Minority Report que Steven Spielberg avait adapté de la nouvelle de Philip K. Dick. On y sent aussi la très forte influence d’autres oeuvres rattachées au genre cyberpunk, telle Ghost in the Shell.
L'intrigue se centre plus spécifiquement sur les membres de la Direction des Enquêtes Criminelles du Bureau de Sécurité Publique, la police chargée d'éradiquer le crime dans cet univers de science-fiction. Ces derniers utilisent des armes intelligentes appelées Dominateurs et capables d'analyser en l'espace d'un instant l'âme des individus sur lesquelles elles sont pointées, sachant qu'il résulte de cette analyse le degré de probabilité que les personnes visées commettent un crime, soit ce que l'on appelle plus communément le coefficient de criminalité, ou encore le Psycho Pass. Suivant que ce dernier soit plus ou moins élevé, trois cas de configuration possibles s'offrent alors : le Dominateur restera bloqué et de ce fait inoffensif, il sera activé en mode paralyseur ou bien son tir deviendra létal, faisant exploser la cible sans autre forme de procès. Ajoutons à cela qu'il peut aussi opter pour le mode décompresseur dans le cas où l'agent fait face à une menace immédiate et matérielle, telle une machine pilotée par un tiers, par exemple. Si le fonctionnement des Dominateurs est dans l'ensemble cohérent et très bien pensé, je mettrai toutefois un léger bémol, à savoir leur mode d'élimination donnant lieu à des scènes parfois inutilement gores, qui va plus ou moins à l'encontre d'un système comme Sybille, tendant normalement à supprimer toutes les aspérités de la vie en société en vue d'obtenir un rendu final épuré, lisse et aseptisé. Ceci dit, on pourra toujours répondre que le caractère atroce de l'exécution peut être envisagé dans l'optique de dissuader tout individu qui serait tenté de commettre un crime ou plus généralement d'aller à l'encontre du système. Mais je concède que cela reste tout de même gratuit, d'autant que la maturité d'une œuvre n'est pas tant liée à la violence l'imprégnant (les deux ne sont pas non plus antinomiques) qu'à la capacité à traiter de thématiques graves et surtout à les traiter intelligemment. Cette violence m'a d'ailleurs nettement moins dérangée dans la première saison de Psycho Pass, puisqu'utilisée avec parcimonie et pertinence, contrairement à la seconde, de toute façon inférieure à tous points de vue à celle qui la précède (ça ne reste bien sûr qu'un avis personnel).
Passée cette digression, pour en revenir au fonctionnement du Bureau de Sécurité Publique, ce dernier se divise essentiellement en deux groupes d'individus, à commencer par les Exécuteurs, dont le coefficient de criminalité n'est pas suffisamment élevé pour qu'ils se voient éliminés, mais non plus assez bas pour qu'ils puissent sortir des centres de soins où ils ont été internés afin de les "soigner", incapables dans la plupart des cas d'ensuite réintégrer la société à titre de citoyens lambdas, sachant que la seule autre option qu'il leur reste est de rejoindre les rangs au service de la répression exercée par Sybille, dans une perspective utilitariste, puisqu'aptes, en raison de leur statut particulier, à penser comme les criminels qu'ils traquent et ainsi à les "flairer". Par ailleurs, se servir de criminels latents et "déjà corrompus" pour supprimer d'autres criminels sans que les bons citoyens n'aient à se salir les mains répond plutôt bien à la logique de Sybille. Mais afin d'éviter tout débordement et potentiel risque qu'eux-mêmes se retournent contre le système qui les instrumentalise, ils sont encadrés par des Inspecteurs, dotés quant à eux d'un Psycho Pass tout à fait normal et véritables détenteurs du pouvoir de décision dans la direction des enquêtes.
Au début de l'histoire, Akane Tsunemori intègre le Bureau en tant que nouvelle Inspectrice et c'est donc à travers ses yeux que nous allons appréhender le fonctionnement si particulier de la Direction des Enquêtes, et plus généralement de la société régie par Sybille. C'est pourquoi les dix premiers épisodes se présentent surtout comme une série d'investigations divisée en plusieurs arcs narratifs, permettant d'aborder en filigrane différents sujets chers à la science-fiction, et plus précisément l'anticipation, tels l'absurdité d'une logique poussée à l'extrême, le monde du travail, les dérives liées à l'essor des réseaux sociaux (Facebook ayant été ici supplanté par le CommuField), la place qu'occupe l'art dans une société dénaturée par la technologie ou encore la cybernétique. Les membres de Bureau vont alors devoir un affronter un ennemi redoutable, le véritable fil conducteur de cette première saison, le marionnettiste qui tirait les ficelles derrière les précédents crimes qu'ils pensaient avoir résolus. Sa dangerosité se voit accrue par le fait qu'il est un criminel asymptomatique, soit un cas exceptionnel parmi les individus composant cette société (le taux de fréquence dans la population n'étant que d'une personne sur deux millions), présentant un Psycho Pass immaculé ne reflétant en rien ses véritables actes, lui conférant ainsi la possibilité de perpétrer ses crimes en toute impunité, échappant totalement au contrôle du Système Sybille, puisque les Dominateurs n'ont sur lui aucun effet. Cet ennemi n'est autre que Makishima Shougo, qu'un des Exécuteurs, Kougami Shinya, est bien décidé à tuer pour venger la mort d'un de ses collègues (cela n'empêchera pas à contrario que Makishima en vienne d'une certaine manière jeter son dévolu sur ce dernier, puisque fasciné par ses capacités d'analyse et l'acuité de son jugement, prenant plaisir à les mettre à l'épreuve).
S'il est un personnage dans cette série qui, de mon point de vue, se trouve au-dessus du lot, et se démarque de loin des autres, c'est bien celui-ci, complexe et nuancé comme je les aime, très bien écrit et pensé de bout en bout, d'autant qu'au fur et à mesure que progresse l'intrigue, la perception que nous avons de lui peut évoluer de manière significative, ce qui ne change au demeurant en rien le fait qu'il reste un pur psychopathe. On apprend à le craindre lors de ses premières apparitions, de par sa propension à manipuler les individus dont il se sert tels des outils, son sadisme avéré et la cruauté de ses actes, mais pour autant, je n'ai pu m'empêcher de m'attacher à ce personnage de par la fascination qu'il exerçait sur moi. Intelligent et extrêmement cultivé, la cause qu'il défend et son regard extrêmement lucide vis-à-vis de Sybille et la profonde hypocrisie imprégnant ce système nous conduisent à remettre en question nos jugements, notre regard sur le monde et ce qui définit les frontières du bien et du mal, ne pouvant être conceptualisées dans l'absolu, comme lui-même se plait à le laisser entendre : « Qu'est-ce qui définit un crime selon toi ? Le Dominateur que tu tiens dans ta main ? ».
Makishima est d'une certaine matière comparable à Néo dans la Matrice, soit une anomalie systémique rarissime qui échappe aux lois d'un système visant à atteindre la perfection et capable à elle-seule de le faire vaciller. Mais là où Néo est bien entendu le nouvel élu censé mettre fin à l'asservissement de l'humanité par les machines ayant recours à la Matrice pour simuler une autre réalité (enfin, c'est tout de moins ce qui vaut pour le premier Matrix, puisque qu'il semblerait d'après les suites que l'élu et la prophétie ne soient qu'un leurre en vue de canaliser les velléités contestataires restantes, d'une manière somme toute comparable à ce qu'expose Alain Damasio dans son oeuvre La Zone du dehors, autre incontournable de l'anticipation, la résistance se voyant toujours manipulée et pilotée par le système oppresseur en vue de piper les dés et d’asseoir sa domination), Makishima s'avère quant à lui être un salaud pour le moins ambigu, un personnage résolument "humaniste", désireux de voir l'âme humaine se réaliser dans toute sa multiplicité et ses potentialités, à la différence de Sybille, qui tend au contraire à rendre les individus passifs, amorphes et interchangeables, même si l'expression de ce que l'être humain possède dans sa plus profonde essence passe par la concrétisation de sa part d'horreur et de ce qu'elle peut receler de plus ignominieux, ce qui, du point de vue du philosophe Makishima, n'en reste pas moins intrinsèquement lié à la "splendeur de l'âme humaine", pour reprendre ses termes.
Son apparence fait justement pleinement sens avec ses traits de caractère, notamment son Psycho Pass, d'une blancheur toujours immaculée, quelque soit le degré d'atrocité de ses actions (on peut voir aussi au travers de cette contradiction le prisme de la confrontation entre d'une part le point de vue essentialiste et déterministe, et, d'autre part, un existentialisme partant du postulat que seuls nos actes nous caractérisent). Son faciès est en quelque sorte comparable à celui d'un ange tombé du ciel, venant, de par sa seule existence (le fait qu'il soit un criminel asymptomatique) remettre en cause les fondements-mêmes du système Sybille, qui prétend pourtant à l'omniscience, au même titre qu'un Dieu, quitte à se confronter au paradoxe de l'omnipotence. Cela signifierait-il que Sybille est en réalité le diable ? L'ascendance symbolique de Makishima transparait aussi via le fait qu'il soit toujours représenté surplombant ses adversaires, comme on peut le voir lors de sa rencontre avec Tsunemori Akane ou de sa première réelle confrontation avec Kougami Shinya au sommet de la Tour Mona (un des lieux clés de l'intrigue, si ce n'est même le plus important). Il est donc en quelque sorte l'Ange de la Mort, annonciateur de l'apocalypse, à la fois juge et bourreau d'un système qui s'arrogeait jusqu’à présent le droit de juger tout le monde sans qu'on ne puisse le juger en retour. Ce caractère « angélique » et quasi divin se retrouve par ailleurs à la fin du thème musical qui lui est dédié, puisqu'il finit par monter très haut dans les aigus et rappelle à certains égards un chant liturgique. Dans la version longue de la première saison, au cours laquelle de nombreuses scènes inédites ajoutée lui sont consacrées, l'ouverture du premier épisode de la série a été modifiée, puisque mettant en scène le personnage énonçant un monologue tout en contemplant la ville du sommet de la Tour Mona, tel le philosophe de l'Allégorie de la Caverne léguée par Platon, scrutant ses semblables lovés dans l'obscurité, alors qu'il est quant à lui parvenu à briser ses chaines et se tourner vers la lumière pour se voir révéler la vérité, appréhendant le monde dans son essence-même, et non en s'arrêtant aux ombres trompeuses d'un absurde spectacle de marionnettes. L'analogie évidente que l'on peut faire durant ce passage vient une nouvelle fois renforcer le caractère transcendant du criminel asymptomatique échappant à toute emprise et portant son regard sur ce qui ne peut être jugé, à savoir les visions prétendument justes de la prêtresse Sybille.
Certes, Makishima n'est pas non plus d'une très grande originalité dans le monde de l'animation japonaise, qui a souvent une certaine tendance à représenter les monstres et salauds d'anthologie sous les apparences les plus pures, marquant une certaine dissonance entre le reflet extérieur de ces personnages et la noirceur qui se tapie au plus profond de leur âme (ce qui vaut par exemple pour Griffith de Berserk ou encore Johan Liebert de Monster). Néanmoins, pour Makishima, ce contraste me paraît moins marqué, d'autant que sa cruauté vient en quelque sorte en contrepoids à celle que revêt le système Sybille. Dans sa volonté de supprimer toute attitude déviante de la norme et d'enrayer la criminalité, ledit système contribue par le biais d'une sorte de sélection naturelle, instituée telle un darwinisme social, à l'émergence de criminels d'envergure d'autant plus monstrueux au regard de ce qui pouvait exister par le passé, de la même façon qu'un antibiotique donnant « naissance » à une super-bactérie quasi-impossible à éradiquer et de ce fait bien plus dangereuse que ses congénères. C'est le principe de l'escalade, telle que formulée par le commissaire Gordon dans Batman Begins : « Que faites-vous de l'escalade ? Quand on aura des semi-automatiques, ils utiliseront des automatiques. Quand on portera du kevlar, ils auront des balles perforantes; ». Au sein de la trilogie de Christopher Nolan, le Joker est en quelque sorte l'ultime produit de cette escalade initiée par Batman dans sa volonté de débarrasser Gotham du vice et de la corruption, un être marginal qui n'aurait exercé qu'une mince influence (puisque peu fiable et un tantinet psychotique), mais qui, dans le cas présent, va, du fait d'une conjoncture favorable, supplanter la pègre et semer un chaos sans précédent dans la ville. Sans le Batman, il ne serait sans doute jamais sorti de l'ombre. C'est grâce à lui, d'une certaine manière, qu'il s'est donné une raison de vivre et a trouvé sa place dans ce monde, une "vaste blague", d'après son positionnement nihiliste, en se faisant l'ultime némésis de la chauve-souris. « Tu me complètes », comme il le dit lui-même. Dans une perspective comparable, Sybille et Makishima sont les deux facettes d'une même pièce, les deux extrêmes opposés participant à la préservation d'un équilibre qui perdure toujours malgré le système et sa puissance normative, même si le point de convergence s'est sensiblement déplacé.
Une fois passé le cap des dix premiers épisodes, que l'on peut considérer d'une certaine manière comme une longue introduction permettant au spectateur d'incorporer progressivement les rouages qui déterminent la marche suivie par cette société futuriste, le criminel qui pilotait dans l'ombre d'autres tueurs en série, les aidant à concrétiser leurs pulsions jusqu'alors réprimées et à accomplir leurs volontés inavouables sans entrave, se décide à lui-même intervenir. À l'aide d'un pirate informatique surdoué, il met à exécution son plan en vue de faire tomber Sybille, le tout s'enchainant avec brio dans ce qui demeure à mon sens le paroxysme atteint par la série en terme d'intensité dramatique, le dernier tiers de la saison 1 étant quant à lui un peu plus faiblard. Ce plan illustre très bien l'ironie et les visées politiques qui imprègnent les crimes de Makishima Shougo, puiqu'ayant recours à ceux qui, par la faute de ce système, véritable gouvernement suprême, dont les déclinaisons dépassent largement le cadre sécuritaire, comme en témoigne par exemple les affectations professionnelles décidées selon le profil psychologique des individus, se vont vu relégués au rang de parias d'une société désireuse d'effacer ses propres aspérités, quitte à employer les méthode les plus radicales, au mépris du droit à chacun à disposer de son libre arbitre. Il leur offre en effet dans le cas présent une occasion de se venger de leur sort, grâce à une technologie conférant la possibilité d'échapper par un procédé détourné aux scans cymatiques. Ainsi, le plan de Makishima réside dans le fait de dupliquer de manière artificielle sa capacité à rester émancipé du contrôle de Sybille à une très grande échelle en vue de créer un chaos sans précédent. Ajoutons à cela l'effet boule de neige formé par une sensible hausse du niveau de stress face à un tel regain de violence, et par corrélation une augmentation de la proportion de personnes dont le Psycho Pass ne répond plus aux normes, cédant à leur tour à la folie sous l'effet de la panique.
Ce processus débute par une séquence à mes yeux assez emblématique, durant laquelle une femme passant dans la rue se fait agressée par un individu masqué en totale roue libre puisque non détecté par les scans cymatiques ou les Dominateurs. Cette dernière finit par se faire briser le crâne à coups de marteau sans que les passants ne daignent réagir pour se porter au secours de la victime, plusieurs d'entre eux filmant même la scène. Certains pourraient s'insurger devant un tel degré de passivité au sein de la foule, mais c'est bien malheureusement un reflet qui n'est pas si éloigné de notre réalité, comme en attestent ce que l'on nomme l'effet témoin (ou effet spectateur), ainsi que des faits divers de triste mémoire, telle l'affaire Kitty Genovese. De plus, dans ce cas-précis, tout laisse à penser que, au sein d'une société où la violence a été plus ou moins éradiquée et où les individus désinhibés sont encouragés à la passivité, en vue de diminuer leur stress, au point d'en devenir complètement abrutis, des coquilles vides (ce que montre d'ailleurs l'arc narratif dédié à la place de l'art dans la société), cet effet sera à fortiori d'autant plus présent. Par conséquent, il est "normal" que, lorsqu'un groupe de personnes assiste à ce qui relève alors de l'impensable, ces dernières ne comprennent tout simplement pas ce qui se déroule sous leurs yeux. La première phase qui vient donc marquer le processus initié par le terroriste Makishima est l'incompréhension la plus totale. À cette incompréhension succède ensuite la montée du stress, la panique, puis, pour finir, l'embrasement dans la violence. Cela s'accorde de surcroît avec le message que veut faire passer le criminel asymptomatique, pointant du doigt la déshumanisation qu'a atteint une société soucieuse de rejeter toutes les imperfections de l'humanité. De ce fait, cette série de crimes a beau signifier l'horreur, il n'en reste pas moins qu'elle répond à une certaine logique et à des valeurs propres auxquelles se conforme le personnage dont il est ici question, sans compter le fait que, comme on l'apprendra plus tard, le but ultime de ce plan machiavélique n'était pas d'engendrer un chaos momentané, mais de disperser les forces de police grâce à cette diversion, pour finalement s'introduire dans les locaux de la Tour Mona, centre névralgique du pouvoir en place, où se trouve localisé le cœur de Sybille, ce qui est censé correspondre à son ordinateur central...
De plus, s'il ne fallait retenir que deux uniques scènes mettant en scène le personnage de Makishima Shougo, je citerai d'abord celle marquant la première confrontation directe entre lui et l'Inspectrice Tsunemori Akane. Durant cette séquence, Makishima tente de s'enfuir avec son otage, Yuki, l'une des amies de l'Inspectrice, mais se fait intercepter par cette dernière, qui la menace d'utiliser le Dominateur s'il n'obtempère pas immédiatement, sauf qu'elle finit par réaliser que l'arme ne fonctionne pas sur son adversaire, le Psycho Pass du criminel en fuite arborant toujours une teinte claire, quelque soit le degré de gravité de ses crimes avérés. Shougo en fait d'ailleurs la parfaite démonstration puisqu'il commence à torturer Yuki avec un rasoir, sous les yeux d'une Akane horrifiée et incapable de faire quoique ce soit. C'est alors qu'il décide de la tester et lui donne l'arme à feu qu'il avait sur lui, un vieux fusil de chasse ne dépendant en aucune façon du contrôle de Sybille. Le deal est simple, si Tsunemori ne se sert pas du fusil pour le tuer, son amie mourra. Plusieurs se sont plaints durant cette scène de l'incompétence notoire de Tsunemori, incapable d'utiliser une arme à feu pour éliminer un individu qui se présente de lui-même à l'abattoir, ce que n'aurait pas hésité à faire par exemple l'Exécuteur Kougami, mettant ainsi un point final à l'intrigue. Ça ne reste bien sûr que mon point de vue, mais je pense qu'ils n'ont tout simplement pas compris les enjeux que revêtait cette scène.
Néanmoins, il me paraît nécessaire de faire auparavant une petite mise au point sur la manière dont fonctionnent les Dominateurs. Dans la mesure où ces armes sont ni plus ni moins les yeux de Sybille, la perception des utilisateurs est altérée (ce que mettent en exergue les plans de l'anime faisant un énorme focus sur les yeux des personnages), la résultante étant une sorte de réalité augmentée avec des informations et annotations diverses et multiples, tel le fameux Psycho Pass calculé à partir du scan cymatique effectué sur les cibles désignées. Si j'insiste sur ce détail, c'est parce que ça me paraît essentiel pour expliquer le fait, que, comme on le voit dans la série, les Inspecteurs, tout comme les Exécuteurs, peuvent se servir du Dominateur pour paralyser, voire éliminer leurs cibles, sans pour autant que leur propre Psycho Pass ne s'en trouve affecté. D'une certaine manière, ceux qui utilisent les Dominateurs sont davantage manipulés par lesdits Dominateurs (et par extension le système Sybille) qu'ils ne les contrôlent. C'est pourquoi Tsunemori Akane est à ce moment incapable d'utiliser le fusil pour abattre Makishima Shougo alors qu'elle se trouve pourtant face au pied du mur, dans l'urgence de sauver un autre cher. D'une part, parce que l'acte de tuer par l'exercice de sa volonté propre entre en totale contradiction avec sa nature, mais aussi parce que, si elle se résout en fin de compte à tuer Makishima, ce dernier étant le seul à échapper pour d'inextricables raisons au jugement de Sybille, elle deviendrait à son tour une indésirable aux yeux du système. Ainsi, elle échoue et tire à côté, et nul doute que le criminel asymptomatique auquel elle est confrontée, impavide, l'avait anticipé. J'y vois par ailleurs une référence à l'adage, popularisé notamment par le fameux comic book scénarisé par Alan Moore, V pour Vendetta, selon lequel les idées sont « à l'épreuve des balles. ». C'est pourquoi cette scène est à mes yeux si importante, outre le fait qu'elle soit sans doute l'un des meilleurs passages de toute la série, de ceux qui font pour moi qu'elle est clairement au-dessus du lot dans ce qui se fait actuellement au sein de la japamination, sans pour autant égaler ses illustres ainés (Ghost in The Shell et consorts). C'est là la démonstration éclatante de toute la vanité du système Sybille de par sa propension à vouloir guider le destin des individus, tandis que Makishima, sur le point de tuer Yuki, donne le fusil à Tsunemori Akane, lui accordant la possibilité de l'abattre et l'enjoignant à accomplir un acte de volonté : « Je ne serai pas tué par une machine, mais par ta propre volonté. Ce serait une magnifique façon de finir ma vie. Maintenant, tu sens le poids sur ton index, non ? C'est une chose que tu ne connaitras jamais en étant une marionnette de Sybille. C'est le poids de décider quelque chose de soi-même. ». Puis vient ensuite le fameux « C'est regrettable, vraiment regrettable, inspectrice Tsunemori. Blâme ton impuissance et désespère. » et la résolution attendue de cette scène, qui lui confère toute sa portée tragique.
La rivalité entre le criminel asymptotique Makishima Shougo et l'Exécuteur Kougami Shinya, l'un des points d'articulation de l'intrigue
Par ailleurs, si, à l'instar d'autres personnages dans la série, la manière dont Makishima tend à citer des œuvres peut paraître à certaines reprises artificielle et forcée (je songe notamment à la séquence durant laquelle il déclame un texte de Shakespeare alors qu'il vient de décider d'éliminer un de ces pantins, qui, par son imprudence, s'est compromis aux yeux du Bureau et ne lui est donc plus d'aucune utilité), je pense que cela va en quelque sorte de pair avec le fait que le personnage soit un criminel asymptomatique, une singularité dans la masse des individus qui composent la société gouvernée par Sybille, celui qui sait prendre du recul. Il en résulte nécessairement un décalage, retranscrit par son apparence physique, sa manière de s'exprimer ou encore son penchant pour la lecture via les livres authentiques au lieu des e-books. Une certaine propension à utiliser des citations à tout bout de champs me paraît donc plutôt à propos si l'on prend en compte la personne qu'est Makishima Shougo dans toute son étendue. C'est aussi l'occasion pour l'auteur Urobuchi, de distiller ci et là des références aux œuvres littéraires et concepts qui l'ont inspiré, de 1984 de George Orwell au panoptique (dispositif architectural particulier d'une prison permettant à un seul gardien de surveiller une multiplicité de cellules d'un même angle) tel qu'imaginé par Jeremy Bentham en passant par Philip K. Dick. Bien que cette dernière œuvre ne soit pas citée, la société telle que décrite dans Psycho Pass m'a pour ma part beaucoup fait penser au Meilleur des Mondes d'Aldous Huxley, selon moi plus intéressant qu'un 1984 pour décrire les travers de nos sociétés actuelles, dans la mesure où, alors que ce dernier est bien plus volontiers une grille de lecture d'une dictature soviétique ayant atteint son apogée avec le stalinisme, l'oeuvre d'Huxley dépeint quant à elle un totalitarisme d'un genre nouveau, au sein duquel, aux instruments coercitifs et répressifs caractéristiques d'un régime totalitaire classique, a suppléé l' « Amour de la Servitude », un peu à l'instar du capitalisme néo-libéral moderne, qui se distingue quant à lui par l'exercice d'une violence symbolique implacable, un culte du consumérisme et l'incorporation de plaisirs intrinsèques remplaçant désormais les désirs extrinsèques (cf. Capitalisme, désirs et servitude de Frédéric Lordon). Mais pour en revenir aux propos de Makishima Shougo, chacune de ses répliques pourrait se voir analysée dans la mesure où, par delà l'étalage de sa culture, elles viennent toutes mettre en lumière la multiplicité des facettes de sa personnalité.
De plus, la plupart de ses citations se prêtent admirablement bien aux situations, et j'en viens de ce fait à la seconde scène qui, à mon sens, fait de lui un personnage mémorable. Elle survient au cours de l'épisode 17, après que Makishima ait été neutralisé de la manière la plus inattendue par Tsunemori Akane (alors qu'il s'était défait sans difficulté d'un adversaire comme Kougami Shinya au cours d'un combat singulier), puis remis aux mains des « autorités compétentes » du système Sybille. S'ensuit alors une discussion entre lui et Joshu Kasei, celle qui préside le Bureau de Sécurité et fait donc, en tant que représentante directe de Sybille, office d'intermédiaire entre le système et le commun des mortels. On apprend alors qu'elle n'est autre qu'une cyborg et que sous ses traits se dissimule Kozaburo Toma, un ancien associé de Makishima, lui-aussi criminel asymptomatique, sa disparition dans des circonstances mystérieuses s'expliquant par le fait qu'il ait été incorporé au fonctionnement-même de Sybille, système dont on découvre enfin le vrai visage, dans ce qu'il a de plus insidieux. En effet cette soi-disant intelligence artificielle, censée de par sa nature rester hors d'atteinte des possibles vices et biais cognitifs de l'humain, n'est en réalité rien d'autre qu'un ensemble de cerveaux interconnectés formant une supra-conscience. Or, le système, dans sa logique systémique et absolutiste, en est venu à intégrer les « cerveaux déviants », ceux des criminels asymptomatiques qui, en raison de la singularité de leurs modes de pensée, échappaient à son jugement, en vue d'enrichir son champs d'analyse et son degré d'expertise (on peut donc légitimement penser que la proportion de criminels asymptomatiques au sein de la population se réduit au fur et à mesure que ces derniers sont assimilés de gré ou de force dans les rouages du système). Sybille est donc bien loin d'être aussi parfaite qu'elle veut le faire croire à ses citoyens, ce que laisse d'ailleurs transparaitre l'insatiable soif de pouvoir exprimée par Joshu Kasei et son désir de transcender sa conscience pour atteindre l'omnipotence. Elle propose donc à Makishima, très désiré pour ses aptitudes, de les rejoindre, tout en précisant bien qu'ils peuvent de toute façon l'y contraindre par la force. Le criminel asymptomatique se moque alors de la vanité des prétentions de Kasei et par extension de la prêtresse Sybille, puis cite un passage des Voyages de Gulliver sur le docteur venu de Balnibari :
Joshu Kasei : « Tu deviendras un membre du système Sybille, personne n'aura plus de sagesse que nous ! ».
Makishima Shougo : « On croirait entendre le docteur de Balnibari. […] On en parle dans Les Voyages de Gulliver. Balnibari est l'endroit qu'atteint Gulliver après l'île volante de Laputa. Un professeur de Balnibari trouve un moyen de réconcilier des politiciens avec des idées contraires. Il couperait chaque cerveau en deux pour recoudre un hémisphère avec un autre. Une fois terminé, cela créerait de la modération et une régulation dans la manière de penser. C'est pour les vaniteux pensant être venus au monde pour le contrôler et le gouverner que Swift a écrit cette approche utopique. ».
Joshu Kasei : « Tu es un génie du sarcasme, Makishima Shougo. ».
Makishima Shougo : « Moi non, mais Swift certainement. ».
Cette répartie cinglante, juste parfaite, illustre à mon sens à merveille l'acuité du regard de Makishima Shougo. Et, outre le fait de rendre indirectement hommage aux Voyages de Gulliver, œuvre qui a inspiré divers auteurs japonais (Hayao Miyasaki pour son Château dans le ciel, Yukito Kishiro pour la ville des cieux de Zalem dans Gunnm) , c'est une manière intelligente pour Makishima de signifier ce qu'il pense vraiment du système Sybille et de la proposition de Joshu Kasei, soit de la possibilité de rejoindre cette entité de cerveaux interconnectés, cette conscience collective, bien loin d'être un progrès, participant de son point de vue d'une restriction et d'une uniformisation de la pensée. Le fait qu'il refuse cette proposition est un acte fort. C'est pour ma part à partir de ce moment-là que, bien que n'ayant pas ressenti de réelle animosité à l'égard d'un personnage doté d'un charisme aussi électrisant que celui de Makishima Shougo, et ce malgré l'atrocité de ses précédent crimes et les nombreuses victimes qu'a causé le chaos qu'il a déclenché en vue de renverser Sybille, qu'un tournant très important dans la série est pris, que j'ai vraiment commencé à considérer celui jusqu'à ce moment désigné comme antagoniste en tant que personnage « positif », en quelque sorte le plus « sain » (toute proportion gardée ; l'expression doit bien sûr être prise ici avec des pincettes et mise en relation avec le contexte dans lequel l'histoire de Psycho Pass s'inscrit). Le geste de Makishima vient ainsi appuyer l'assertion de Jiddu Krishnamurti selon laquelle « Ce n'est pas un signe de bonne santé malade que d'être bien adapté à une société malade. ». Sa vision sur cette société prétendument utopique, qui lorgne finalement davantage du côté de la dystopie, est extrêmement lucide. Jusqu'à la toute fin de la première saison, je souhaitais même le voir réussir face au Bureau. Quand Joshu Kasei / Kozaburo Toma lui dit, en proie à l'incompréhension et au désespoir face à la décision de son ancien ami, parvenu à renverser la situation à son avantage et à deux doigts de le tuer, « Pourquoi ? Je pensais que tu comprendrais. La joie de l'omnipotence et le plaisir de gouverner le monde ! », ce dernier lui rétorque « Comme un dieu, tu veux dire ? Cela pourrait être plaisant d'une certaine manière. Mais malheureusement, je ne veux pas être un juge ou un arbitre. Je ne ne peux pas pleinement profiter du jeu si je ne peux pas y prendre part... J'aime ce jeu que les gens aiment « vie », et ce du fond de mon cœur ! ». La réplique est excellente. Makishima ne vise nullement à conquérir le pouvoir ou dominer le monde parce qu'il est bien au-dessus de tout cela. En fin de compte, l'antagonisme entre Makishima et Sybille m'a bien plus marqué que celui entre le criminel asymptomatique et sa némésis Kougami Shinya, l'Exécuteur vengeur à ses trousses, assez proche du cliché du brun ténébreux, flic ou ex-flic agissant en électron libre et au mépris du règlement. De plus, je me suis bien plus identifié à Shougo qu'à l'Inspectrice Tsunemori Akane, censée de par son évolution (certes intéressante... après que sa naïveté confondante m'ait donné envie de la baffer en début de saison) montrer la possibilité d'un compromis, d'une troisième voie entre le système profondément déviant et pervers qu'est Sybille et la fascination malsaine de Makishima pour le chaos et la désolation, le problème étant selon moi qu'avec la vision d'Akane, on reste trop proche de Sybille, sans compter le fait que je me sens de toute façon en complet décalage avec sa vision du monde et sa croyance inflexible (butée) en la justice et la suprématie d'une loi juste pour ordonner la société (mais ce n'est bien sûr que mon opinion).
Le positionnement de Makishima sur le plan des idées est donc aussi l'une des raisons pour lesquelles ce personnage mérite à mes yeux davantage le titre d' « anti-héro » qu'un individu comme par exemple Light Yagami dans Death Note, qu'on nous présente dans un premier temps comme un jeune homme désireux d'utiliser le cahier de la mort pour éradiquer le crime et créer un monde parfait (ce que je trouve personnellement plutôt stupide pour quelqu'un censé être aussi intelligent que Light, puisque ne prenant pas en compte les composantes sociologiques poussant les gens à commettre tel ou tel crime ou encore le fait que bon nombre d'injustices soient permises par la loi), mais qui d'emblée, s'avère être un individu méprisant et méprisable se laissant corrompre par sa mégalomanie compulsive pour finalement délaisser peu à peu cet idéal. Makishima Shougo peut certes être perçu comme un monstre de par sa cruauté et une certaine absence d'état d'âme, mais il a le mérite de rester jusqu'au bout fidèle à ses convictions et ses principes, à une "éthique" qui lui est propre (si l'on puit dire). Et j'ai même été personnellement ému par sa mort, pathétique dans l'acceptation première du terme, et non péjorative, comme ça peut être le cas encore une fois à contrario d'un Ligth Yagami perdant tout contrôle de lui-même et cédant à la lâcheté une fois démasqué. Certes, les deux personnages n'ont tout compte fait pas grand chose en commun, issus d'oeuvres dissemblables et véhiculant des valeurs différentes, mais le parallèle me paraissait tout de même intéressant à faire ici. Makishima, quant à lui, finit, une fois acculé et en l’absence de toute échappatoire, par accepter son destin de la manière la plus sereine qui soit. Sa tranquillité n'est pas sans rappeler les fondements de l'école de pensée stoïcienne sous l'Antiquité, marquée par l'importance de régler sa conduite conformément à ses principes et d’arrêter soi-même l'heure de son trépas (un suicide philosophique, en quelque sorte). Ses derniers mots auront même su toucher ma corde sensible : « Les gens sont seuls, les gens sont creux. Ils n'ont plus besoin des autres. Chaque relation peut être remplacée. Chaque compétence a son substitut. C'est ainsi qu'est le monde dont je me suis lassé. ».
La seule ombre au tableau concernant le personnage de Makishima Shougo reste pour moi que le scénariste ait été obligé de fournir dans la dernière partie une justification personnelle à ses agissements, comme si les idées dont il se réclamait jusque-là n'étaient d'une certaine façon qu'une façade, la véritable source de ses motivations résidant dans la "souffrance" inhérente à sa condition de criminel asymptomatique en proie à la solitude, puisque non reconnu en sa qualité d'être humain par un système incapable d'établir la moindre correspondance entre sa nature profonde et ses actes, comme si, en fin de compte, son existence importait peu. Faire du ressentiment provoqué par le rejet dont Makishima s'est senti victime la principale raison le poussant à oeuvrer comme il l'a fait jusqu'alors peut certes constituer une manière d'étoffer le personnage et apporter une nouvelle grille de lecture loin d'être inintéressante, mais cela vient à mes yeux amoindrir sa force évocatrice et son pouvoir de fascination en tant que singularité échappant à toute lecture rationnelle de l'esprit et de l'entendement humain, y compris par cette entité suprême qu'est le système Sybille. Cependant, je ne pense pas non plus que cela vienne infirmer les convictions de Makishima, comme on peut le voir lorsque Kougami le prend une ultime fois à partie : "Tu ne supportes tout simplement pas d'être seul". Comme toujours, la répartie est cinglante : "Ce que tu dis est très amusant. Qui ne se sent pas seul dans cette société ? Il n'y a plus de place pour les communautés en ce monde, où tout le monde vit selon les règles du système et est contrôlé par le système. Chacun reste dans sa propre cellule et le système les contrôle en donnant à chaque individu sa propre sérénité. N'es-tu pas pareil, Kougami Shinya ? Personne n'a accepté ton idée de la justice. Et personne n'a compris ta colère non plus. Tu as donc tourné le dos à la confiance et l'amitié et abandonné le seul endroit pouvant te convenir pour venir jusqu'ici. Et tu te gausses de ma solitude ?". Ainsi, même une fois le mystère sur les motivations de l'antagoniste levé, il n'a pas pour autant perdu ce qui faisait le sel de sa personnalité.
Bon, je ne vais peut-être pas m'attarder plus longuement sur ce personnage, histoire de ne pas m'étaler davantage, bien qu'en réalité, j'aurais encore beaucoup à en dire.
https://www.youtube.com/watch?v=wt5nDbXOunA&t=60s
Et pour finir, concernant Psycho Pass, voilà, pour rester en accord avec la thématique de la série, la petite citation totalement sortie de son contexte, venant synthétiser ce que je pense de la société qui y est dépeinte : « Un peuple prêt à sacrifier un peu de liberté pour un peu de sécurité ne mérite ni l'une ni l'autre, et finit par perdre les deux. » (Benjamin Franklin). Tout lien avec un quelconque contexte actuel en France serait bien sûr, vous vous en doutez, purement fortuit.